Bulletin des Auteurs – Comment s’est constituée l’association « Les Auteurs et leurs Œuvres / Lalo » ?
Bruno Guillard – Elle a été fondée par un groupe de créateurs et d’éditeurs, Jean-Marie Moreau, Dominique Pankratoff, Jean-Pierre Bourtayre, Gérard et Jean Davoust et Claude Lemesle, qui en assure la Présidence. Emmanuel de Rengervé est le garant juridique des contrats.
Quant à moi, je suis ingénieur et j’apporte ma connaissance en technologie et en benchmarking, c’est-à-dire comment s’inspirer de la façon dont d’autres secteurs, l’industrie, le droit, la mode, etc., défendent la création sur Internet.
L’objet de l’association consiste en la défense et l’exploitation graphique des œuvres, notre propos est de lutter contre leur publication illicite (faite sans l’accord des auteurs et sans les rétribuer) et de promouvoir leur publication licite.
Le constat est malheureusement affligeant, il est impossible, pour un auteur, un compositeur, ou même les éditeurs, de suivre l’évolution technologique et de faire les développements successifs nécessaires pour se maintenir à flot sur Internet. La mission de Lalo est de mettre à leur disposition des outils totalement gratuits, qui leur permettent, en un seul clic, de la manière la plus simple possible, sans aucune connaissance en informatique, de promouvoir leurs œuvres sous forme d’offres sur Internet.

Les services de l’association permettent ainsi :

• de convertir automatiquement leurs paroles des chansons en format informatique de type Json pour les publier sur les différentes plateformes de streaming dans le Monde.
• de transformer leurs partitions en Flipbook (Livre feuilletable) et de les diffuser et commercialiser partout en Europe en partenariat avec l’Ecsa.
Ou encore
• de faire revivre au format électronique les livres qu’on ne peut plus trouver, comme La Grande Histoire de la chanson française, de Pierre Grosz ou les Song books, les recueils de chansons, que nous proposons sous forme d’e-book, à l’ensemble des écoles de musique et des bibliothèques.

B. A. – Les auteurs signent un « Bon à tirer » numérique.
B. G. – Il est insupportable pour les auteurs et leurs éditeurs de voir circuler leurs paroles avec des fautes d’orthographe, et mal retranscrites. Avec les outils Lalo, nous produisons un fichier PDF, où a été mise en forme l’intégralité du texte, accompagnée de l’expérience de la publication, c’est-à-dire des noms de l’auteur, du compositeur, des éventuels adaptateurs ou arrangeurs, des éditeurs, des interprètes, la date de copyright, fichier qui est validé par l’auteur ou son éditeur et devient le document référent à toutes les plateformes.
Grâce à nos accords de distribution, notamment notre rôle d’agrégateur, cette version « conforme et véritable » se retrouve référencée en premier sur Google, avant celles des contrefacteurs.
L’objectif n’est pas que les internautes viennent chercher les paroles sur Lalo, l’objectif est que, quel que soit le site qu’ils consultent, ils retrouvent les paroles validées par l’Auteur ou son éditeur.
Nous les distribuons vers 174 sites de publication de paroles dans le monde.
Tous les semestres, nous produisons l’état de consommation de ces paroles, avec le montant des revenus publicitaires associés à leur consultation gratuite, qui revient pour 50 % à l’auteur ou à son éditeur.
Les internautes aiment chanter en écoutant. Lorsque les paroles défilent avec la musique, les gens regardent leur écran. C’est ce que cherchent les publicitaires.
Montrer les paroles est donc un plus pour les sociétés de streaming, qui acceptent de les rémunérer.
Sur les 60 000 titres français actuellement disponibles sur Deezer, seulement 14 000 sont accompagnés de leurs paroles. Vous imaginez le manque à gagner pour les auteurs. Il convient que dès sa création, la chanson soit assortie de ses paroles, afin d’en suivre le succès, et que le parolier ne soit pas oublié. L’Auteur peut également créer un Song book.

B. A. – Et pour ce qui est des partitions ?
B. G. – Comme ces partitions s’adressent à des chorales, des écoles de musique, des amateurs ou des professionnels, elles sont proposées à l’achat et au téléchargement.
Au compositeur ou à l’éditeur d’en fixer le prix.
Sont offertes en feuilletage les premières pages et la possibilité de payer pour recevoir la partition en Flipbook ou en PDF.
Si le compositeur est édité, l’éditeur touche 80 % des droits de vente.
Si le compositeur n’est pas édité mais qu’il a fait le travail d’édition, et présente sa partition soit en PDF soit en version plus évoluée avec Finale ou Sibelius, il touche 80 %. Lalo est alors un simple distributeur, et à ce titre retient 20 %.
Si le compositeur n’est pas édité et que Lalo effectue le travail d’édition, la mise en forme, le produit de la vente est partagé à 50/50 entre Lalo et le compositeur.

B. A. – Quel contrat propose Lalo ?
B. G. – Un contrat de licence, validé par le Snac, accessible en ligne. À chaque œuvre déposée par l’auteur-compositeur correspond un contrat. Nous le limitons à un an, renouvelable par tacite reconduction, parce que l’objet de l’association est d’offrir des outils aux auteurs, et non de les contraindre. Si, grâce à ce service, l’auteur-compositeur trouve un éditeur, et que cet éditeur ne veuille pas recourir à Lalo, l’auteur-compositeur reste libre de disposer de son œuvre.
Par ailleurs nous offrons le même service aux éditeurs. Une licence pour une œuvre ou un catalogue. Nous rémunérons alors l’éditeur pour l’ensemble des œuvres qu’il nous confie, qui émanent de plusieurs auteurs, avec une reddition détaillée par œuvre.

B. A. – Est-ce que Lalo exerce un droit de regard sur le contenu de ce qui est diffusé ?
B. G. – Lalo n’est pas éditeur et ne contrôle pas ce que l’auteur (ou l’éditeur) met en ligne. En revanche, nous avons lancé avec Jean-Michel Bardez la Collection Bleu, pour la musique contemporaine et nous animons, avec Ecsa, un réseau d’échanges, Composers’ Directory, qui permet que circulent les œuvres auprès des écoles de musique, et 700 de vos consœurs et confrères, qui vont pouvoir partager, réagir, et certaines peut-être, jouer.
L’important est de toucher les bonnes personnes. La force des outils Internet, c’est qu’il n’y a pas besoin de payer au préalable.
Que l’audience suive, ou non, ce n’est pas un obstacle. Si, grâce à Lalo, vous pouvez trouver, en Europe, un public de 300 personnes, c’est déjà fantastique.

B. A. – Qu’est-ce que le Flipbook ?
B. G. – Un e-book feuilletable. Aujourd’hui, le consommateur n’échange pas du texte. Il échange des photos. Nous transformons votre contenu en photos. À chaque page sa photo. On ne peut copier-coller son contenu, et on peut l’échanger. La photo va circuler, sur Instagram, sur Pinterest, et systématiquement renvoyer vers le site où figure votre œuvre. Ce que vous avez mis en consultation libre, plus les gens le trouveront ailleurs que chez vous, et que chez Lalo, mieux ce sera. Plus c’est un objet manipulable par un téléphone portable, de manière simple, mieux c’est ! Le Flipbook présente également l’avantage d’ouvrir le document, grâce au moteur de recherche, directement à la page où figure le terme que vous cherchez.

 

Cet entretien est paru dans le Bulletin des Auteurs n°129 (avril 2017)

Crédit de la photo de Bruno Guillard : GLRD Publication

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